Faisait partie autrefois du diocèse de Senez. Très grande commune de 11665 hectares située dans le Haut-Verdon, elle a été investie par de nombreux petits hameaux tout le long de la vallée. Cette multiplicité a engendré la création de trois paroisses succursales au XVIIe siècle (La Foux, Bouchiers et Baumelle), ainsi que pas moins de 29 chapelles. L’enquête sur les lieux de culte de 1899 n’en recense plus que 10 (1). Outre l’église paroissiale, une chapelle retient particulièrement l’attention, celle de Saint-Pierre.

C’est vers 1056, dans la charte concernant Colmars, qu’est cité pour la première fois Allos. Plusieurs personnages, avec leurs femmes et leurs enfants, font don à l’abbaye de Saint-Victor de Marseille, de la dîme des fromages des Alpes qui sont produits à la Collo Martio (Colmars) et à ad Alodes (Les Alleux). En outre, ils donnent la dîme des poissons du lac qu’ils appellent Levedone (lac d’Allos). Sont ensuite énumérés les confins et limites des lieux où ces dîmes seront perçues par les moines (CSV II, n° 765, p. 110).

10. La chapelle Saint-Pierre, ancienne paroisse.

La tradition, tenace, répète que la chapelle Saint-Pierre était l’ancienne paroisse. Cela commence par Mgr Soanen en 1699 lors de sa visite pastorale : la chapelle de St Pierre qui est l’ancienne paroisse dont les prieurs tirent son nom (ADAHP, 2 G 17, f° 154). L’enquête sur les lieux de culte de 1899 confirme : la chapelle de S. Pierre, sur le chemin de Bouchiers, est la plus ancienne chapelle d’Allos, autrefois église paroissiale. L’abbé Pélissier, dans son histoire d’Allos de 1901, reprend ces données et ajoute que la tradition dit également qu'il y avait un cimetière à côté de cette chapelle, et la tradition est ici appuyée sur l'usage immémorial de chanter, chaque année, le jour de la fête de saint-Pierre, à l'issue de la messe, un Libera pour les morts qui reposent dans ce cimetière. Ces morts sont très nombreux, puisque l'action du temps, en corrodant peu à peu le petit plateau, surtout du côté du levant, met sans cesse à découvert des ossements humains. Puis, il tente une explication : il y a donc eu en cet endroit une agglomération d'habitations, à l'occasion d'une ou de plusieurs calamités publiques. Or, après avoir étudié avec soin les traditions locales et ce que disent les historiens provençaux de la première invasion musulmane, j'estime que nos pères ont cherché, pour la première fois, un refuge à saint-Pierre, pendant cette invasion. Le quartier est aujourd'hui tellement dénudé par les orages qu'il ne conserve plus que quelques rares vestiges des murailles qui l'entouraient autrefois. Longtemps après les Sarrasins, deux tours le défendaient : l'une, au levant, près du bois de Vacheresse ; l'autre, au couchant, sur la rive gauche du torrent de Bouchiers, et dont on voit encore les premières assises dans un champ nommé la Tourré, qui fait partie de la campagne de la Basse-Collète. Ces tours ont été construites probablement lorsque le vicomte de Turenne ravageait la Provence, ou à l'époque des guerres de religion, car la distance qui les sépare des anciennes murailles, qu'elles devaient défendre, nous prouve qu'elles n'existaient pas avant l'invention de la poudre à canon (2) .

11. Notre-Dame de Valvert

La paroisse d’Allos est sous le titre de Notre-Dame de Valvert et a pour patron saints Pierre et Paul. Elle dépendait de la mense épiscopale de Senez. Ecartée du village, elle ne sert que pendant l’été, la chapelle Saint-Sébastien, construite dans le village, faisant office de paroisse pendant l’hiver. Si les abbés Pélissier et Féraud la datent du XIe siècle, les historiens actuels la situent plutôt au XIIIe siècle (3) . La CAG (n° 006, p.76) fait état de découvertes anciennes près du cimetière et de l’église consistant en tombes en pleine terre et sous coffres de dalles, parfois accompagnées de mobilier médiéval (pégaus). Ici encore le terme médiéval reste très imprécis.


Synthèse

Il ressort une donnée qui ne semble  pas souffrir de contredit, Saint-Pierre est l’ancienne paroisse et la tradition de venir prier pour les morts du cimetière conforte ce fait. Cette paroisse est liée, selon l’abbé Pélissier, à un village fortifié dont il restait quelques vestiges qu’il a remarqué au début du XXe siècle. Or le village actuel d’Allos a été créé lors de l’enchâtellement aux XIIe-XIIIe siècles. Des restes de fortifications sont encore repérables aujourd’hui. Il faudrait donc admettre que Saint-Pierre a été créé auparavant. L’hypothèse de l’abbé Pélissier avançant la première invasion musulmane, c’est-à-dire IXe-Xe siècle, pourrait se révéler judicieuse. Cependant si Saint-Pierre est l’ancienne paroisse pour les habitants qui ont créés le castrum d’Allos au XIIe siècle, Notre-Dame de Valvert pourrait être encore plus ancienne et la paroisse originelle. Les tombes du haut Moyen Age, son établissement en milieu ouvert, près du Verdon, confortent cette hypothèse. Il y aurait donc eu une première paroisse dédiée à Notre Dame durant la période carolingienne. Au IXe-Xe siècle, lors des troubles, l’habitat se serait perché plus haut dans une agglomération fortifiée avec une église dédiée à Saint Pierre et son cimetière. Le calme revenu, l’habitat serait de nouveau redescendu près de la première église, pour bâtir un nouveau castrum à proximité.


(1) En voici la liste : Outre l’église paroissiale, récemment restaurée, qui est éloignée de la ville et ne sert que pendant la belle saison. 1° Chapelle de S. Sébastien, qui sert d’église paroissiale pendant l’hiver, au centre de la la ville. 2° Chapelle de S. Roch, sur le chemin de Colmars. 4° Chapelle de S. Pierre, sur le chemin de Bouchiers, la plus ancienne chapelle d’Allos, autrefois église paroissiale. Le curé ne dit la messe dans ces chapelles, celle de S. Sébastien excepté, que le jour de la fête patronale. Elles n’ont d’autres titres qu’un usage antique. Même observation pour les chapelles suivantes, qui sont dans les hameaux et qui servent en outre quand le curé doit porter les sacrements dans les hameaux. 5° N.D. de Grâce, au quartier de Guiman. 6° S. Jacques et S. Philippe au Seignus-Bas. 7° S. Laurent, diacre, au Seignus-Haut. 8° Ste Brigitte au quartier de ce nom. 9° Ste Madeleine, au Villard-Bas. 10°. N.D. de la fleur, au Villard-Haut.

(2) Pélissier, Histoire d’Allos, depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours, Digne, 1901.

(3) Collier (p. 114-115). Alpes Romanes (p. 323-326). Atlas Historique (p. 159-160). Bailly (p. 45).

  • À propos de l'auteur : Daniel Thiéry