Faisait partie du diocèse et de la viguerie de Digne, aujourd’hui dans le canton de La Javie. Le terroir montagneux s’étend sur 1299 hectares et n’a pu accueillir une grande population. Les 125 habitants de 1315 seront le maximum jamais dépassé. Le polyptique de Wadalde de 814 cite une bergerie à Argario, sans doute à l’emplacement du village qui lui a emprunté son nom (CSV II, H 76, p. 648). En 1193, le castrum d’Argal est donné au chapitre cathédral de Digne par deux seigneurs, Tarion et Raymond de Saint-Julien. La confirmation de cette donation est approuvée par Ildefonse la même année (Isnard, p. 304-305 et 432). Par la suite, la seigneurie demeurera dans les mains du chapitre jusqu’à la Révolution. En 1351, la prebenda de Archallo se monte à 30 livres, tandis que le cappellanus de Archallo perçoit 10 livres (Pouillés, p. 255 et 257).

17. L’ancienne église Notre-Dame et la procession votive

Quand Archail apparaît en 1193, c’est sous la forme d’un castrum et la paroisse est déjà établie avec son église dans le village. Elle est sous le titre de Notre-Dame de l’Assomption et a pour patron secondaire saint Georges. En 1698, elle est en effet dédiée à Notre Dame avec un tableau représentant le couronnement de la Vierge (ADAHP, 1 G 5). Visite pastorale du 21 juin 1684 : lors de cette visite l’évêque remarque que le cimetière est esloigné du village, il est au devant de la chapelle qu’on dit avoir esté l’ancienne église lequel cimetière n’est point clos. Achard relate que les Fêtes de S. Georges et de N.D. d’Août se célèbrent avec un grand concours des habitants des lieux voisins. La Procession part de la paroisse de S. Georges pour se rendre à la Chapelle de Notre-Dame. Les jeunes gens sous les armes la précèdent et les filles portent des gâteaux garnis de rubans. A leur tête sont les deux Abas avec leurs Abadessos. Ce sont eux qui ouvrent le Bal après le dîner, auquel les Etrangers ne sont pas admis à danser qu’après tous ceux d’Archail. Le prix de la course est un gâteau et celui des quilles un agneau. L’abbé Féraud reprend les mêmes données : Il existe une petite chapelle bâtie sur une hauteur, que l’on croit être l’ancienne église paroissiale, et à laquelle on se rendait autrefois en procession. Les jeunes gens, sous les armes, ouvraient la marche. Les filles, précédées de deux abas et de leurs abadesses, portaient des gâteaux garnis de rubans. Il y a une école primaire. L’enquête sur les lieux de culte de 1899 confirme la cessation de la procession : chapelle dédiée à Notre Dame de l’Assomption, située à l’intérieur du cimetière et dans laquelle aucune cérémonie n’est célébrée depuis 40 ans.

Cette chapelle, qualifiée d’ancienne paroisse où l’on se rendait en procession festive, est éloignée du village de 500 mètres, sur une haute colline dont le sommet a été aplani et consolidé pour y abriter le cimetière et une église. Le cimetière est toujours en fonction et c’est sans doute ce qui a sauvé l’édifice de l’oubli complet. Féraud signale en effet que la procession se faisait autrefois et au cours du XXe siècle la chapelle n’est plus entretenue. Elle a été restaurée en 1994 en réutilisant les pierres d’origine et en reproduisant le type d’appareil, mais plus grossièrement. Des photos prises avant la restauration montrent un mur à l’appareil lité à joints beaucoup plus fins que ceux qui ont été réalisés lors de la restauration. L’édifice d’une trentaine de m² est orienté à 90°. A l’intérieur subsiste dans le mur de chevet une petite ouverture à ébrasement en arc plein cintre qui a été bouchée de l’extérieur. Un massif de pierres a été dressé entourant la pierre monolithe soutenant la pierre d’autel, elle aussi monolithe. Ces deux pierres semblent d’origine.

La colline sur laquelle sont établis l’église et le cimetière n’est pas assez vaste pour accueillir un habitat. Celui-ci devait être en contrebas, dans la plaine et les collines, en fermes dispersées. On reconnaît ici l’implantation d’une église avec son cimetière en un lieu isolé correspondant aux premières églises rurales précédant l’incastellamento. L’église du castrum va reprendre la même titulature que l’église originelle, Notre-Dame, ce qui est souvent le cas quand il y a un transfert de paroisse. Elle utilise cependant toujours le même cimetière bien qu’éloigné et peu commode par la rudesse de la pente à gravir. Jusqu’au XVIIIe siècle, l’ancienne église sera l’objet d’un pèlerinage festif. Abandonnée, la mémoire collective tenace depuis un millénaire, permettra sa restauration à la fin du XXe siècle.

Synthèse

Après une première mainmise par les moines de Saint-Victor à l’époque carolingienne, le territoire se révèle à nouveau à l’aube du premier millénaire avec la création de l’église Notre-Dame élevée sur une colline pour desservir un habitat dispersé. Elle est aux mains de laïcs, seigneurs locaux. Ils en font don au chapitre ainsi que de leur castrum. Celui-ci se fortifie et regroupe la communauté autour d’un nouveau lieu de culte, tandis que le premier conserve par un pèlerinage la mémoire de sa création.

  • À propos de l'auteur : Daniel Thiéry