Faisait partie du diocèse de Riez et de la viguerie de Digne, aujourd’hui dans le canton de Mezel. Cette commune de 2610 hectares est établie au bord de l’Asse au nord du plateau de Valensole. La faible altitude (500 m en moyenne), les rives de la rivière et les plateaux la dominant ont très tôt attiré l’activité humaine. Il est probable qu’une voie antique passait en rive gauche de l’Asse reliant la cité de Riez à celle de Sisteron. Une autre se dirigeait vers la Durance en suivant le cours de la rivière (CAG, n° 031, p. 107).

C’est l’une des possessions que le patrice Abbon offre, en 739, à l’abbaye de Novalaise, in pago Regense Braccio, locellum Bractium (CSHG, p. 44). Pour l’époque, il faut situer le lieu sans doute en rive gauche de l’Asse, près de la voie antique. Il peut faire suite à un site romain, de type vicus ou à une mansio. Le toponyme La Bégude Blanche, petit hameau en face du village, évoque une auberge et une halte pour les voyageurs. Cette vocation d’accueil des voyageurs a-t-elle pu perdurer et se transmettre pendant un si long temps ?

Quand Bras d’Asse réapparaît ensuite c’est au cours du XIIIe siècle avec un castrum et une église, Capellanus de Brachio et ecclesia de Brachio (Pouillés, 1274, p. 109 et 1351, p. 112). Le site de la Bégude semble avoir été délaissé en partie pour un habitat perché sur l’autre rive. En 1241, le 2 août, Raimond Bérenger V confisque le castrum de Bratz, situm juxta flumen quod vocatur Assa, détenu par Guigonnet de Galbert pour le donner à un certain Périssol (RACP, n° 345, p. 423-425). Par la suite, au XVIe siècle, le castrum sera détruit puis délaissé au profit d’un nouveau village construit en contrebas, près de l’Asse, avec une nouvelle église sous la titulature de Saint-Nicolas de Myre. Début XXe siècle, le vieux village est complètement abandonné. Au XIXe siècle, une autre paroisse va voir le jour, celle de la Bégude avec une église dédiée à Notre-Dame. Les documents de ce siècle indiquent qu’il n’existe pas de chapelle rurale sur la paroisse de Bras d’Asse, mais qu’il en existe une à la Bégude.

69. La chapelle Saint-Jean-Baptiste de la Bégude

C’est la carte de Cassini (n° 153) qui nous révèle cette chapelle St Jean, située au SSO de la Bégude Blanche, près du lieu-dit Fude. De 1860 à 1891, est citée la chapelle rurale de saint Jean-Baptiste qui demande des réparations urgentes. En 1893, il n’est plus question de réparations (1). Enfin, lors de l’enquête sur les lieux de culte de 1899, il est relaté : à la Bégude, une chapelle distante du village d’environ un kil, a servi d’église paroissiale depuis l’érection de la paroisse en 1840, jusqu’en 1853, époque où fut achevée l’église actuelle. Le curé y dit la messe le dernier jour des Rogations et pour la fête patronale qui est le 24 juin. Elle sert en outre pour les funérailles du voisinage. Mais en 1908, elle est en mauvais état. A partir de cette date, elle n’apparaît plus sur les cartes modernes car elle est devenue une propriété privée.

Elle est encore aujourd’hui en état, au bord de la D 108, 800 m au SO de la Bégude (2). Le bâtiment est encore entier, mais le mur de l’abside a été ouvert pour permettre le passage des engins agricoles, puis fermé par un large vantail. L’intérieur est encombré d’engins et d’outils. Il existe un plafond en planche qui dissimule la voûte si elle existe. On aperçoit en entrant à droite une fenêtre bouchée de l’extérieur. Sur les murs, subsistent des traces de bandes de peinture et surtout une frise de décor en stuc représentant des entrelacs. L’extérieur a été rebâti en tout-venant, pierres de toute taille noyées dans du mortier légèrement ocré. L’élément le plus remarquable est la porte d’entrée formée par un arc plein cintre décoré de plusieurs moulures reposant sur des piédroits de forte dimension, encadrement qui ne semble pas homogène. Celui-ci est au ras du nu du mur.  Au-dessus de la porte, une niche en plein cintre qui devait contenir une statuette. Encore au-dessus oculus ouvert vers l’extérieur. A gauche de la porte  ouverture quadrangulaire formée de quatre forts moellons, maintenant bouchée. A droite, fenêtre moderne. L’édifice est orienté vers le SO et mesure à peu près 10 x 7 m. Le propriétaire relate qu’on lui avait dit qu’on avait trouvé des crânes de très jeunes enfants au pied des murs de la chapelle.

Synthèse

Les données sur la chapelle Saint-Jean sont trop succinctes pour tenter une approche de fondation. La seule remarque que l’on peut faire, c’est qu’elle est située dans un milieu ouvert, non défensif, près d’une voie antique et qu’elle était liée à un cimetière. Si l’église de la Bégude est dédiée à Notre-Dame depuis son érection en paroisse en 1840, le patron est saint Jean et au XIXe siècle, on se rend à la chapelle le 24 juin pour la fête patronale. L’éloignement de la chapelle du hameau de la Bégude indique qu’elle n’est pas liée au hameau, mais qu’elle est une chapelle rurale sise en plein champ, en rapport avec un habitat dispersé. Ces diverses constatations pourraient nous diriger vers un édifice pré-castral.


(1) Visites de 1860, 1866, 1870 (ADAHP 2 V 89), de 1891 (2 V 93) et de 1893 (2 V 94).

(2) Nous l’avons visité le 11 octobre 2008 et rencontré le propriétaire.


Note de Mme Christiane Aubert en 2013 : " Je voudrais signaler une erreur concernant la "descente du village de Bras-d'Asse" dans la vallée. Elle ne s'est absolument pas produite au XVIe comme votre rédaction semble le dire mais à la toute fin du 19e et tout début du 20è. cet évé,nement n'est en reien reliéà la destruction du castrum ni aux guerres de religion. Le village est simplement "descendu" pour profiter des nouvelles voies de communication et de l'endiguage des rives de l'Asse qui ont permis une vie plus facile dans la valée qui était autrefois dévastée par les crues et isolée par le manque de route. Originaire du village par ma mère et toute une longue série d'ancêtres je puis attester que mes grands-parentsont quitté Le Vieux Bras en 1901 ou 1902.
Je signale aussi le remarquable roman de Maria Borrely "Le Dernier Feu", datant des années 30, (Jeanne Laffitte) relatant la vie des habitants juste avant "la descente".

  • À propos de l'auteur : Daniel Thiéry